À tort ou à raison, l’architecture est souvent perçue comme une science et un art cartésien, précis et méthodique qui rend seulement compte de calculs ou de mesures. Pourtant, le mandat de l’architecte dans l’élaboration d’un bâtiment va beaucoup plus loin. Son travail consiste aussi à réfléchir les espaces de vie pour qu’ils s’intègrent au mieux possible à leur environnement et pour que chaque personne qui habite la demeure s’y sente bien. Ce mantra, l’architecte Jérôme Lapierre l’incarne à merveille grâce à ses réalisations toutes aussi posées, réfléchies et sensibles.
Crédit photo : Maxime Brouillet | Architecte : Jérôme Lapierre
Un dialogue avec l’espace, une symbiose entre l’intérieur et l’extérieur
Le dialogue entre l’architecture et le paysage est une philosophie prônée depuis 1988 par l’architecte Pierre Thibault. À ces débuts dans le milieu, Jérôme Lapierre a travaillé avec lui pendant 11 ans. Évidemment, il se sentait interpellé par le discours de son mentor, qui privilégie les insertions sensibles dans le terrain plutôt que d’envahir le paysage avec une architecture mal proportionnée. « Je pense que quand on est capable de bien lire le paysage, il est possible de créer une architecture qui elle peut s’insérer délicatement. Bien sûr, chaque intervention construite a un impact sur le paysage, mais le but c’est de comprendre pour créer un dialogue. C’est ce dialogue qui pour moi est le baromètre pour savoir si on fait un bon projet ou non », explique Jérôme Lapierre. Ce dialogue se construit grâce à une lecture minutieuse de l’espace, aux proportions justes des volumes pour qu’ils s’insèrent dans le paysage.
Maintenant qu’il exploite sa firme d’architecture, Jérôme Lapierre poursuit cette réflexion en y adoptant sa propre philosophie, soit de célébrer l’ordinaire. Mais, en quoi consiste « l’ordinaire »? Il s'agit de créer une expérience polysensorielle en convoquant les différents contextes et univers du projet pour magnifier l'architecture. Qu'elle soit elle-même insérée dans le paysage naturel ou urbain, il porte une attention particulière à ce que l'espace puisse devenir une scène de théâtre dans la laquelle la lumière, les ombres créées au fil de la journée et des saisons ainsi que les matières créent réceptacle pour un spectacle vivant. Autrement dit, ce sont des petites choses ordinaires qui dépendent de l’architecture pour être vues différemment et célébrées.
Crédit photo : Maxime Brouillet | Architecte : Jérôme Lapierre
Faire d’une habitation une expérience émotive
L’idée de la complémentarité, d’un tout cohérent, réside aussi dans la simplicité. Un concept complexe et réfléchi de façon hollistique se transpose par des bâtiments aux proportions justes, aux volumes délicats et des intérieurs à l’échelle humaine. Ces éléments sont aussi des préceptes d’une maison dans laquelle il fait bon vivre créant un équilibre entre besoins humains et disponibilités des ressources. Des espaces ni trop petits, ni trop grands, du mobilier adapté à la taille des pièces, intégrer de la biophilie et les écosystèmes, favoriser une proximité avec l’extérieur, offrir de larges perspectives sur l’extérieur : voilà les ingrédients incontournables, selon Jérôme Lapierre, pour créer un environnement intérieur chaleureux. Il y a aussi la présence d'une fenestration bien choisie, un outil indispensable pour créer une connexion puissante entre l’intérieur et l’extérieur. « Je vois la lumière comme un matériau, je suis très sensible à un rayon du soleil qui va pénétrer dans l’espace et rebondir sur d'autres surfaces. Souvent, je vais capturer ces moments, ça me touche exceptionnellement », ajoute-t-il. « Le pouvoir de l’architecture, c’est d’être capable de susciter des émotions chez les personnes qui vivent dans le bâtiment. C'est mon défi dans tout projet de tenter de les provoquer. »
Et comment cette influence se traduit-elle explicitement dans un intérieur? Par la manière de façonner l'espace, sa volumétrie, par le choix de matières naturelles, par la luminosité, entre autres, qui ont un impact direct sur le comportement des personnes qui l’habitent. Les espaces ouverts et lumineux ont pour effet de diminuer le stress et agissent directement sur le confort physique et mental des gens.
Crédit photo : Maxime Brouillet | Architecte : Jérôme Lapierre
Des projets uniques, toujours dans le souci du bien-être
Les projets signés par la firme Jérôme Lapierre Architecte se distinguent par leur unicité et leur diversité, certes, mais surtout par toute la sensibilité et l'ambiance qui leur sont infusées. Si le bois est une matière privilégiée, l’architecte et son équipe s’inspirent également de ce qui se fait en Europe, où l'utilisation de matières différentes renouvellent les expériences de projet. Ainsi, dans les projets de construction, l’expression des matières brutes et de la structure est privilégiée, ce qui amène moins de matériaux, moins de surfaces à recouvrir et moins d’émissions de gaz à effet de serre à terme. Une attention aux détails et aux assemblages devient en ce sens encore plus important. Lors de la rénovation du cadre bâti, la priorité est à la préservation plutôt que la démolition dans le contexte planétaire où il faut réduire l'empreinte carbone des bâtiments. L'idée est de conserver le plus de choses possibles, de penser globalement et d'agir localement pour atteindre une pratique plus durable.
En somme, le rôle de l’architecte est de créer un environnement spatial résilient qui influence le bien-être des humains au-delà des matières et des objets. Un projet d'architecture ne dépend pas de plaire aux tendances. Il vise avant tout une réponse créative aux besoins humains, qu'elle soit intemporelle et pérenne, ancrée sensiblement au territoire par une conception globale et systémique, tout en tenant compte du contexte local, social, économique et écologique
Crédit photo : Maxime Brouillet | Architecte : Jérôme Lapierre